After Foot : Après un débat tendancieux sur le fait religieux, l’émission phare du foot français dans la tourmente

Par Yassine Bouali

Depuis plus de 15 ans, l’After Foot, émission culte de RMC animée par Gilbert Brisbois, Daniel Riolo ou encore Jérôme Rothen, est réputée pour son ton libre, souvent provocateur, et son regard acéré sur l’actualité footballistique. Mais cette fois, ce n’est pas une tactique d’équipe ou un choix de sélectionneur qui met l’émission au cœur de la polémique, mais bien un débat sur la place du fait religieux, et plus particulièrement de l’islam, dans le football français.

Un dérapage aux allures de procès religieux

Tout est parti d’un échange diffusé en direct lors d’un After Foot du mois d’avril. Un auditeur évoque la situation d’un joueur professionnel ayant refusé de participer à une action contre l’homophobie en raison de ses convictions religieuses. Ce cas relance alors un débat en plateau, durant lequel plusieurs chroniqueurs — notamment Daniel Riolo et Stéphane Guy — tiennent des propos considérés par certains comme stigmatisants ou réducteurs à l’égard des musulmans.

Des phrases comme « il faut qu’on arrête de mettre la religion au-dessus du football » ou encore « à force de tolérer, on crée des exceptions dangereuses » ont fait bondir de nombreux auditeurs. Le ton employé, parfois jugé condescendant ou méprisant envers les convictions religieuses, a cristallisé les tensions.

Réactions en chaîne sur les réseaux sociaux

Sur X (anciennement Twitter), le mot-clé #BoycottAfterFoot a rapidement été en tendances. Des milliers d’internautes, musulmans ou non, ont dénoncé un « deux poids, deux mesures » récurrent dans les médias sportifs dès lors qu’il est question d’islam.

Certains journalistes indépendants, influenceurs foot ou anciens joueurs ont également pris la parole. L’ex-international français Anelka, connu pour ses prises de position sans filtre, a déclaré :

« Dès qu’un joueur musulman fait un choix, on le traîne dans la boue. Mais quand c’est un choix chrétien ou autre, c’est juste “personnel”. Hypocrisie totale. »

D’autres appellent à une meilleure représentation des sensibilités religieuses dans les médias sportifs, et dénoncent une rhétorique islamophobe latente sous couvert de laïcité.

RMC sur la défensive

Face à la tempête médiatique, RMC a tenté de calmer les choses par un communiqué laconique, affirmant que l’émission défend la liberté d’expression et refuse toute forme de discrimination, tout en rappelant que les propos n’engagent que leurs auteurs.

Mais pour beaucoup, cela sonne comme une non-excuse. L’association Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) – bien que dissoute mais dont l’esprit militant survit à travers d’autres structures – a annoncé vouloir saisir l’Arcom (anciennement CSA) pour discours discriminants et incitation à la haine religieuse.

Un révélateur d’un malaise plus profond

Au-delà du cas précis de l’After Foot, cette affaire illustre un malaise persistant autour de la gestion de la diversité dans le sport français. Le football, miroir de la société, reste traversé par des tensions identitaires, culturelles et religieuses que certains médias ont parfois du mal à traiter avec nuance et respect.

La ligne entre laïcité et stigmatisation est parfois fine, et cette affaire remet sur la table la question du traitement équitable des faits religieux dans les espaces médiatiques, sportifs ou non.

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