Ancien défenseur de la RDC (2003-2011), Hérita Ilunga fait partie des membres du groupe d’étude technique de la Confédération africaine de football chargé de mener l’analyse technique de la CAN CAF TotalEnergies 2023. Dans un entretien exclusif accordé à CAFOnline, il apprécie le niveau du tournoi aussi bien sur le plan du jeu que sur l’aspect organisationnel. Il se prononce également sur les chances des demi-finalistes.
Quelle appréciation pouvez-vous faire de la CAN jusqu’à ce stade, sur le plan du jeu et au niveau de l’organisation ?
Un peu comme ce que tout le monde fait, parce que c’est visible. On vit une CAN exceptionnelle dans plusieurs domaines. Au niveau technique, sur le terrain, sur ce que les équipes nous proposent, sur le contenu, sur l’organisation, elles sont beaucoup plus disciplinées. De manière générale, elles partent d’une structure, elles se libèrent, elles sont beaucoup mieux organisées dans l’approche offensive et elles se lâchent, elles nous apportent quand même des fins de matches excitantes, ouvertes. Le gap qu’il y avait entre les grandes nations et les petites est en train de se réduire et c’est ce qui prouve le développement du football africain. Ensuite, il y a des buts, on en a eu énormément, on bat des records. Bien sûr, on va dire que défensivement, on n’est pas costaud. Si, paradoxalement, on est beaucoup plus costaud dans la manière de défendre, on est beaucoup plus cohérent, on est beaucoup plus consistant dans ce qu’on propose dans les matches.
Ça, c’est côté terrain mais l’organisation, de façon générale, elle est top, les terrains sont de très grande qualité, j’ai vu le terrain d’entrainement mis à la disposition de la RDC, qui est quand même sensationnel. On parle de standard mais là, c’est un standard très haut, ce qui fait qu’on vit quand même une Coupe d’Afrique de qualité.
Est-ce qu’il y a des équipes qui vous ont particulièrement marqué depuis le début de cette compétition ?
Je ne parle pas de surprise mais je parle du travail, c’était une belle formulation du coach de la RDC. Ce serait manquer de respect à toutes ces équipes qui travaillent depuis un certain nombre d’années et qui méritent leur parcours, leurs performances dans cette Coupe d’Afrique. Et celles qu’on voit là dans les quatre dernières qui restent sont les quatre équipes qui méritent d’être là, même si elles n’ont pas la même histoire, la même trajectoire, n’ont pas vécu les mêmes scénarios… Mais oui, on va dire qu’il y a eu quelques belles surprises, quelques beaux parcours.
La Mauritanie, j’ai beaucoup aimé voir cette équipe enfin gagner et passer le premier tour, c’est une formidable équipe, avec un super sélectionneur, il faut relever qu’il n’est pas à son premier coup d’essai. Le Cap-Vert qui, malheureusement, échoue à la porte des demi-finales mais sur le match contre l’Afrique du Sud, elle a quand même démontré qu’elle aurait pu, avec plus de réussite passer. Ça ne leur enlève pas leur parcours exceptionnel. La Gambie, un peu moins, on a vu qu’elle pouvait quand même faire des choses hyper-intéressantes. La Guinée a aussi proposé des choses intéressantes. C’est une nouvelle Guinée qui est beaucoup mieux organisée, beaucoup mieux structurée, la qualité offensive, elle l’a toujours eue mais ce qui change, c’est surtout la discipline. La RDC, le retour, on connaissait surtout les qualités individuelles des joueurs de la RDC mais maintenant, c’est une force collective qui ressort de cette équipe, avec du beau jeu…
On va relever encore le manque d’efficacité offensives de toutes ces équipes mais on sent que ce sont des équipes qui sont portées vers l’avant, qui partent d’une structure solide, en jouant au sol, en alternant, avec une philosophie de jeu, un plan de jeu établi et qu’ils respectent. Parlant des plans de jeu à respecter, la Côte d’Ivoire l’a fait quand il a fallu chercher des ressources mentales pour pouvoir renverser le match contre le Mali, ils étaient à 10, mal embarqués, menés 1-0 et ensuite, ils ont réussi à gagner ce match à 10. Et tout ça sans changer le plan initial, en restant structurés et en construisant sa victoire.
La RDC en demi-finale, ce n’était plus arrivé depuis 2015, qu’est-ce qui fait la force des Léopards dans cette compétition ?
C’est forcément leur entraineur, qui a restructuré cette équipe, je dis cette équipe parce qu’on avait toujours des joueurs mais on avait du mal à jouer en équipe. On parle d’une solidité défensive même si c’est quatre buts encaissés mais on voit que c’est vraiment contre des équipes solides. La RDC part de derrière, essaie de construire, jouant dans le cœur du jeu, sur les côtés, avec Wissa sur un côté et de l’autre côté, que ce soit Bongonda ou Meschack Elia, une animation avec les latéraux aussi, deux joueurs devant la défense, solide… C’est très cohérent, très structuré ce qu’ils proposent, que ce soit défensivement ou offensivement, c’est ce qui aujourd’hui, fait en sorte que la RDC est là et mérite d’être là.
Côte d’Ivoire -RDC, quelle sera la clé pour gagner cette demi-finale ?
C’est deux équipes qui n’ont pas du tout eu la même histoire, la même trajectoire dans cette Coupe d’Afrique des Nations. Je crois que la clé se jouera une nouvelle fois dans l’efficacité des deux zones. La Côte d’Ivoire, à part le premier match, a pris au moins un but à chaque match. On me dira, la RDC, c’est pareil mais pas dans les mêmes circonstances. La Côte d’Ivoire a pris beaucoup plus de buts, on a senti qu’avant le match contre le Sénégal qu’elle pouvait un peu se déstructurer, la RDC est restée solide, cohérente pendant toute la compétition. Mais la Côte d’Ivoire, elle nous a quand même montré face au Sénégal qu’elle était capable de sortir un match de très haut niveau contre le favori de la compétition, qu’elle était aussi capable de tomber dans ses travers dans les trente premières minutes face au Mali, elle a plusieurs visages, capable du bon comme du pire. Donc, c’est être bon dans les deux surfaces de vérité et pour la RDC, savoir gérer la pression de l’événement parce qu’il y aura tout un public, tout un pays derrière.
Et pour terminer, parlant de l’affiche Nigéria-Afrique du Sud, à quoi peut-on s’attendre ?
La montée en puissance du Nigéria, on les voit beaucoup plus libérés, ils ont été solides pendant toute la compétition. On peut dire la même chose de l’Afrique du Sud. Je pense que ce sont les deux meilleures défenses, ce sera forcément un match où on n’aura pas beaucoup de buts, je pense que ce sera fermé, ça se jouera forcément sur des détails, sur un coup de pied arrêté ou sur un fait de jeu. Donc, il va falloir, des deux côtés, rester concentré et ne rien l